Évangelistas, le départ

21 janvier 2011


18h30, océan Pacifique, entre le continent et l’île de Chiloe. Les moteurs ronronnent doucement, nous traversons une purée de pois, les grains se succèdent, l’océan encore étale, offre ses eaux noires à la contemplation floue.

Les volcans se cachent derrière les nuages épais. Nous venons d’embarquer sur l’Évangelistas, le ferry qui relie Puerto Montt à Puerto Natales et qui se prend l’espace de l’été, pour un bateau de croisière.



Nous avons remis 20 cents dans la machine à parler anglais même si à nouveau on s’adresse à moi en allemand. Arch ! Nien, nobody is perfect, ai-je pris l’habitude de répondre impuissante. Ce petit trait d’humour tout britannique fait hurler de rire les teutons, bien plus que les saxons, étonnant !
Autour de moi, un immense brouhaha, comme si chacun se sentait autorisé à hurler dans sa langue. Babel à mes oreilles, bercée par le lent tangage, je somnole doucettement. J’évalue dans un flottement indifférent, les derniers progrès de la mode internationale en matière de vêtements de sport. Étrange mélange où certains se présentent à bord en tongs et tee-shirt pendant que d’autres cumulent laine polaire et coupe-vent dernier cri, les matières lisses ou moutonnantes éclatent de couleurs vives ou restent discrètes en étalant une gamme de gris et de beige du plus bel accord avec le temps extérieur. Des chaussures de montagnes annoncent des treks sérieux et je regarde mes sandales réhaussées par les chaussettes offertes par la Qatar airways avec interrogation.


Nous avons des excuses. Hier, la despedida (la dernière soirée, la der, la soirée d’au revoir, je cherche un mot français qui sonnerait bien et rien ne vient) fut impromptue, surgie d’une conjonction étonnante donc fort réussie, donc tardive, donc fatigante. Le bois était sec, il a pris de suite, il a suffi d’une étincelle, le feu s’est allumé.

À partir de 19 h, Alfred anima sa charla (discussion) avec brio pendant que j’aidais la Danae à la confection de biscuits. Tout ceci annonçait une soirée tranquille autour d’un tecito (petit thé) con galletitas al limon caseras (accompagné de biscuits au citron maison). C’était sans compter avec la Prositfest annoncée au centre ville. Une fête de la bière dans la plus pure tradition bavaroise. J’avoue n’avoir aucune expérience en la matière mais à priori il ne manquait rien. La déco était de ballons aux couleurs du drapeau allemand, les stands de bière succédaient aux stands de bière pendant que de l’autre côté de l’allée les stands de saucisses à la chucrut succédaient aux stands de snacks à la moutarde ou de kuchens à tous les fruits possibles. Le tout servi par des filles replètes aux joues rouges et au costume style Heidi ou la Mélodie du bonheur… Vous voyez, non ? J’ai goûté, effrayée, à une bière à l’eucalyptus, une autre au café, celle à la framboise aurait pu passer mais bien trop sucrée. J’ai cherché en vain un goût belge, rassurant, goûteux, sensuel et trouvé une quasi Guiness qui fit l’affaire. Parce qu’ici, on te fait goûter avant d’acheter ! Helen me guidait dans la cohue des buveurs fatigués.

Alfred et Claudia nous ont rejointes avant l’arrivée de Gonzalo et de son frère Andrés, tout frais débarqué de Buenos-Aires. J’ai croisé dans une queue deux jeunes touristes allemands totalement hallucinés par le spectacle qui s’offrait à eux. Ils n’imaginaient pas ça possible… Puis nous sommes rentrés car ici, une fête de la bière se termine à 22 h - sont raisonnables les chiliens, c’est là que la différence se note. Arrivés à la maison, une compétition d’amateurs de merengue, salsa et autre milonga nous a jetés sur la moquette du salon et c’était parti. Une belle soirée.

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